Invitation au voyage


Lui : tu es revenue !
Elle : je me fais du thé, je peux en donner à ton esclave?

La jeune femme est suspendue, nue, dans un entrelacement de cordes , comme une araignée qui a fait un faux pas. Elle aussi semble contente de me revoir. Elle hôche la tête. J’essaye de comprendre la logique de la séquence de bondage pour réussir à lui libérer une main et la bouche. Ok, facile, c’est lui qui l’a attachée.

Lui : elle n’est plus mon esclave. Je ne suis pas un assez bon maître et je ne fais pas des nœuds assez serrés.
Elle : oui, mais tu es un bon amant.
Lui : pas elle
Elle : je veux voir Greg
Lui : Greg est parti en vacances. Tu étais où?
Elle : 5 jours avec un homme, à la campagne, il a des chevaux et un beau corps. Greg revient quand?
Lui : dans longtemps. Tu vas me raconter tes nuits?
Elle : non, je vais te les montrer. C’est quoi longtemps?

Je suis heureuse de le revoir. 5 jours dans les bras d’un autre et j’allais presque oublier comme mon homme est beau et à quel point il me bouleverse.

L’autre, visiblement agacé : Greg est en prison. Il a crucifié un flic sur le plancher de la cuisine.
Lui : le flic n’avait pas le droit de défoncer le squatt, surtout pendant l’heure du repas. Et il n’est pas mort, tu sais.

Je regarde l’autre, je n’attends pas d’explications.

Lui : ne t’inquiètes pas, on a bien laver le plancher.

Pourquoi je m’inquièterais, le plancher est propre, l’araignée a trouvé un nouveau maître, je suis amoureuse d’un homme qui m’aime, rien ne peut m’atteindre. Greg va sortir de prison un jour, peut être.
Je vide ma tasse de thé. On se regarde. Je tombe dans ses yeux et me dirige vers notre chambre, notre refuge, chez Nous, enfin.

Les années ont passées. Il m’a fait le plus beau cadeau qu’on puisse faire. Il m’a enlevé mes peurs, toutes mes peurs les plus secrètes. Rien ne peut plus me détruire, à part moi-même. Le souvenir de cet amour m’habite encore. Nous avons vécu dans un monde parallèle, fait nos propres règles, façonné notre réalité à l’image de nos désirs, repousser nos limites à les inhiber.

La vie aujourd’hui n’est pas fade mais je ne peux me résoudre à vivre selon un modéle pré-établi par une masse d’inconnus , pour le confort de tous , en nivellant par le bas pour permettre aux plus idiots de suivre. L’essentiel réside dans un sentiment profondément ancré au fond de mon cœur et non dans la quantité d’objets accumulés dans un appartement loué. Je ne veux ni plaire ni déplaire, juste affirmer que je ne suis pas ce que je possède ni le metier que je fais ni le rôle social que je joue. J’ai eu la chance d’être invitée dans un univers qui est devenu mien. Je suis totalement moi-même, nue et sans artifice, sans obligation de me conformer à un moule ou de correspondre à quoi que ce soit. Pourquoi je t’en parle aujourd’hui, simple, je t’invite à me rejoindre, là où tu es sans cadre de références imposés, juste ressentis, chez toi, pour un thé avec me-myself-I and You .
Accepteras-tu?